• 29 septembre 2023 15 h 26 min

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Renforcer la Vigilance à l’École : Découvrez le Site #DérivesScolaires

Temps de lecture : 8 min.

Dans un monde ou l' de nos enfants est une priorité, il est essentiel de garantir un environnement sûr et éclairé au sein des établissements scolaires. Cependant, des préoccupations grandissantes concernant les dérives spirituelles et pseudoscientifiques infiltrant nos écoles publiques ont conduit à la création du site #DérivesScolaires, un outil puissant pour renforcer la vigilance et la prise de conscience.

Ce site, accessible à l'adresse http://derives-scolaires.fr, émane de l'initiative d'une enseignante passionnée, qui a ressenti le besoin impérieux de combler un vide en fournissant des informations et des ressources. Tout en reflétant ses propres valeurs, ce travail personnel se concentre avant tout sur la promotion de la vigilance et la diffusion de la connaissance.

Ayant observé ces derniers mois une croissante demande d'informations relatives aux pratiques, activités et contenus à risque présents dans nos écoles publiques, l'initiatrice du projet s'est engagée dans une quête pour déceler les méthodes, pratiques et démarches potentiellement problématiques. Son intérêt s'est élargi depuis les aspects ésotériques de la “pédagogie” jusqu'à des sujets plus larges liés aux dérives sectaires et pseudoscientifiques.

À travers ses constats partagés principalement sur Twitter, elle a rapidement été sollicitée pour fournir des conseils, des informations et des aides dans diverses situations. Dans le but d'atteindre un public plus large et de mieux servir la communauté éducative, le site #DérivesScolaires a vu le jour, mettant à disposition un recueil d'informations précieuses.

Les dérives évoquées sur le site englobent des aspects spirituels en contradiction avec le principe de , ainsi que des pseudosciences contredisant le consensus scientifique. Certaines d'entre elles ne sont tout simplement pas appropriées pour l'éducation. Malheureusement, bon nombre d'entre elles comportent des risques de dérives sectaires, une menace sérieuse, en particulier dans un environnement perçu comme sérieux et fiable.

Les implications des #DérivesScolaires ne se limitent pas aux élèves. Les enseignants sont également vulnérables, étant susceptibles d'être attirés par des “formations” à des pratiques douteuses, qui pourraient les piéger dans des croyances néfastes et potentiellement manipulatrices. Cette situation peut avoir des conséquences néfastes sur leur propre bien-être et leur capacité à guider les élèves de manière impartiale.

Chaque sujet abordé sur le site a été signalé ou a donné lieu à des témoignages inquiétants. Toutefois, l'objectif n'est pas de pointer du doigt ou d'accuser, mais plutôt d'armer les individus de connaissances pour mieux discerner et prendre des décisions éclairées.

L'initiatrice du site clarifie qu'il ne lui appartient pas de bannir certaines pratiques de l'école, mais plutôt de fournir des informations pour guider les choix conscients. De plus, elle souligne l'importance d'enseigner aux élèves à repérer les éléments relevant de croyances et pseudosciences dans les contenus qu'ils consomment, favorisant ainsi leur pensée critique et leur discernement.

Le site #DérivesScolaires devient ainsi une ressource cruciale pour renforcer la vigilance collective et préserver l'intégrité de l'éducation. En éclairant les zones d'ombre et en sensibilisant la communauté éducative, il offre l'espoir d'un environnement éducatif plus sûr et éclairé pour nos enfants.


Interview de la créatrice de dérives scolaires Stéphanie de Vanssay :


Tout d'abord, pourriez-vous me faire une brève présentation de votre personne, s'il vous plaît ?


Je suis enseignante et j'ai précédemment exercé en tant qu'éducatrice spécialisée. Depuis plus de 10 ans, je suis détachée au sein d'un syndicat et chargée des questions liées à la pédagogie en milieu scolaire primaire, ainsi qu'aux usages du numérique dans le contexte éducatif. Dans ce cadre, j'effectue une veille active dans les médias et sur les réseaux sociaux, notamment en ce qui concerne les initiatives relatives à l'.

Je suis depuis longtemps une utilisatrice assidue de Twitter, un outil que je considère comme à la fois citoyen et militant, même si sa propension à la violence n'est pas toujours facile à tolérer. En 2019, j'ai rédigé un ouvrage portant sur les trolls et le cyberharcèlement.



Pouvez-vous nous en dire plus sur les motivations qui vous ont poussée à créer le site #DérivesScolaires et à quelles situations spécifiques avez-vous été confrontée en tant qu'enseignante, et qui ont renforcé votre conviction envers cette initiative ?

L'origine de mon intérêt pour les dérives sectaires a été une vidéo de la chaîne YouTube “La Tronche en Biais“, dans laquelle Grégoire Perra était interviewé. Il y évoquait ses 30 années passées à l'école Steiner en tant qu'élève puis enseignant. Ce m'a profondément interpellé, laissant place à la surprise, l'intrigue et surtout l'inquiétude. Étant spécialisée dans le domaine de la pédagogie, j'ai entrepris de lire les ouvrages de Steiner afin de mieux comprendre. C'est alors que j'ai découvert qu'une “pédagogie” totalement déconcertante pouvait jouir d'une réputation positive en France, même au sein d'écoles sous contrat avec l'Éducation nationale.

Progressivement, grâce à des échanges fréquents avec d'autres individus intéressés par ce sujet, une prise de conscience s'est opérée. C'est presque amusant à dire, mais il y a une part de vérité dans cette affirmation. J'ai commencé à discerner des éléments qui m'échappaient auparavant : la prédominance du mouvement New Age dans notre société, les liens avec le développement personnel et la psychologie positive… Tout cela se retrouve fortement ancré dans les salles de classe, les pratiques de nombreux enseignants et même dans les formations officielles.

En tant que personne qui partage abondamment mes lectures, apprentissages et interrogations sur Twitter, je reçois un grand nombre de sollicitations de la part d'enseignants et de parents. Ces derniers se sentent perdus ou extrêmement frustrés, cherchant des moyens de dénoncer ces dérives et de protéger leurs élèves ou enfants.


Quelles ont été les découvertes les plus marquantes que vous avez faites au cours de ce processus ?

Ce qui m'a le plus frappée, c'est lorsque j'ai réalisé que sur certaines thématiques telles que le bien-être des élèves, la gestion des émotions, le développement des compétences psychosociales, ainsi que l'éducation à l', il n'existait rien de certain, aucune garantie sur laquelle on puisse s'appuyer en toute confiance. Les croyances et les “méthodes magiques”, souvent présentées comme étant scientifiquement vérifiées, pullulent, et il faut s'efforcer de naviguer au mieux dans cette réalité et de faire le tri.

J'ai également été désappointée de constater que le milieu universitaire est particulièrement perméable à ces idées et qu'il contribue à leur diffusion. Cela s'explique logiquement par le fait que les collègues se sentent rassurés lorsqu'une approche ou une pratique est validée par des chercheurs. Cependant, je commence à comprendre que de nombreux universitaires sont en réalité réticents voire critiques, mais qu'ils évitent de condamner des collègues de peur de se fermer des opportunités. Cette situation a pour conséquence de créer l'illusion qu'il existe un quasi-consensus autour de pratiques très douteuses. C'est notamment le cas en ce qui concerne l'intégration de la méditation de pleine conscience à l'école.


Pourriez-vous expliquer plus en détails comment les dérives évoquées sur le site #DérivesScolaires peuvent potentiellement mettre en danger à la fois les élèves et les enseignants ? Y a-t-il des exemples concrets que vous pourriez partager ?

C'est un des problèmes, il est difficile d'expliquer en détails un danger qui est flou, insidieux via des pratiques portées par des personnes qui ont, dans l'immense majorité des cas, les meilleures intentions et la conviction que ces pratiques sont bénéfiques. Pour un enfant, surtout jeune, son maître ou sa maîtresse est un adulte infaillible, ce qu'il dit et fait est très impactant. Même si sur le moment une pratique ou une méthode peut ne pas avoir du tout un impact négatif, elle rentre pour l'élève, et pour sa famille qui a confiance en ce que propose l'École, dans la catégorie “ce truc est sérieux et sûr”. Comme c'est inconscient, c'est d'autant plus efficace surtout si cela a été installé jeune et de façon répétée.
Pour respecter le principe de laïcité, ce qui relève de croyances ne devrait pas être utilisé dans les écoles, mais comme ces pratiques se présentent comme étant scientifiques et laïques, c'est très difficile de faire le tri. 
Pour les enseignants le danger est le même que pour tout adulte : rencontrer une pratique qui leur parle, s'y former pour aider ses élèves et de fil en aiguille en découvrir d'autres… Il y a en ce moment beaucoup d'enseignants qui démissionnent et certains se reconvertissent en montant des activités spiritualo-pseudoscientifico thérapeutiques. D'autres proposent leurs services comme “coach scolaire” ou “thérapeuthe de l'inhibition scolaire” ; selon les cas on est juste sur une dénomination plus tendance du classique “soutien scolaire”, soit on est sur des pratiques pseudo thérapeutiques ou spirituelles.
Après chacun est libre de ses choix mais cela me met particulièrement en colère quand c'est l'Éducation nationale qui via des formations et des injonctions poussent ces collègues dans des impasses qui peuvent les mettre en danger


Le site #DérivesScolaires offre également des conseils sur la façon de repérer les éléments liés aux croyances et aux pseudosciences dans le contenu éducatif. Pourriez-vous partager des exemples de ces conseils et expliquer comment ils pourraient être intégrés dans l'enseignement au quotidien ?

Je m'efforce principalement de rassembler des informations en un même endroit sur mon site et de mettre en évidence les points de vigilance. Je ne suis pas nécessairement la mieux placée pour offrir des conseils, car je reconnais mes propres zones aveugles et parfois un manque d'informations. Mon objectif est d'éviter autant que possible l'aspect “donneuse de leçons” en me basant sur des faits concrets. Lorsqu'un collègue adhère à une pratique problématique, il faut du temps pour qu'il remette en question cette approche et prenne du recul. C'est pourquoi j'essaie d'éviter de condamner catégoriquement quoi que ce soit.

Selon moi, il y a deux aspects essentiels à examiner attentivement avant d'envisager de mettre en pratique quelque chose avec mes élèves :

  1. Se renseigner sur son origine : Qui l'a créée, quand, pourquoi, dans quel contexte, avec quels objectifs ?
  2. Examiner les prétendus bienfaits : Si les avantages sont nombreux et prétendent résoudre les problèmes de tous les élèves, cela est généralement peu crédible.

Les conseils portent davantage sur la manière d' ou de réagir face à une dérive scolaire : expliquer les désaccords ou les interrogations à l'établissement, ne pas banaliser tout en évitant la confrontation directe, et signaler le cas éventuellement à la Miviludes, organisme compétent pour évaluer la situation et intervenir si nécessaire.

En ce qui concerne l'enseignement au quotidien, il y a l'aspect de l'éducation à l'esprit critique, que l'on retrouve dans les matières comme l'EMC (Enseignement Moral et Civique) et l'EMI (Éducation aux Médias et à l'Information). Cela peut être appliqué à tout moment lors des séances d'apprentissage, quelle que soit la matière, mais il faut être conscient de ces opportunités. Je pense également qu'il serait bénéfique d'intégrer le mouvement New Age dans les séances abordant l'histoire des religions. Le fait qu'il soit omniprésent dans notre société sans être véritablement identifié comme relevant du religieux constitue une partie du problème.

Lors des Rencontres de l'Esprit Critique (REC), j'ai échangé avec une enseignante qui se concentre spécifiquement sur la prévention des dérives sectaires auprès de ses élèves. Elle me tiendra au courant de ses résultats, et je diffuserai bien sûr son travail. D'ailleurs, je profite de cette interview pour lancer un appel : je suis vivement intéressée si des collègues explorent de manière spécifique ces sujets avec leurs élèves. Ils peuvent me contacter via le site.


Compte tenu de l'ampleur du défi posé par les dérives sectaires et pseudoscientifiques, comment espérez-vous que ce site contribuera à créer un changement positif dans le système éducatif ? Quels sont vos espoirs pour l'avenir en termes de sensibilisation et de prévention de ces problèmes au sein des écoles publiques ?

Mon souhait est que mon site devienne une ressource précieuse pour les enseignants et les éducateurs en général. De plus, j'espère sincèrement qu'il contribuera à accroître la prise de conscience de ces dangers au sein de nos institutions et organisations : il reste encore beaucoup de chemin à parcourir !

Idéalement, il serait grandement bénéfique que mon site ne soit plus nécessaire, car l'Éducation nationale aurait elle-même intégré ces points de vigilance dans les formations destinées aux enseignants ainsi qu'à ses cadres. De plus, il serait souhaitable que des référents académiques spécialisés dans ces questions soient clairement identifiés et accessibles, afin que parents, enseignants et directeurs d'établissement puissent les contacter en cas de difficultés rencontrées.


Avez-vous un conseil à donner aux parents qui pourraient être témoins de dérives spirituelles au sein de l'école de leurs enfants ?

Oui, comme je le disais plus haut, ne pas banaliser ni dramatiser, signaler à la Miviludes et faire confiance à leur enfant aussi. J'ai fait un article dédié, les commentaires sont ouverts si certains veulent compléter ou partager une expérience.  


Je tiens à exprimer ma gratitude envers Stéphanie de Vanssay pour avoir accepté de présenter son projet.
Vous pouvez retrouver son site sur http://derives-scolaires.fr.

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By Mathieu Porzio

Responsable communication et du numérique du G.E.M.P.P.I. Spécialisé dans les nouvelles technologies et les phénomènes sectaires numériques.

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